Fast and Furious 7 : toujours plus faste ?

Un film de James Wan avec Vin Diesel, Paul Walker, Michelle Rodriguez, Dwayne Johnson alias The Rock, Jason Statham, Jordana Brewster, Ludacris, Tyrese Gibson, Kurt Russel, Tony Jaa, Ronda Rousey, Djimon Hounsou

Surprenant grand écart que j'exécute en ce moment. Alors que je viens tout juste de boucler ma critique de Birdman, voilà que j'entame celle de Fast & Furious 7, le film d'abrutissement de masse typique tels que le dénonce le film d'Iñarritu... Et vous savez la meilleure ? Bah j'ai bien aimé... et à la fin de cette critique vous comprendrez pourquoi. Mais avant de commencer je vous suggère de lire ou relire celle que j'avais rédigée sur Expendables 3 (cliquez sur le titre), les comparaisons entre les deux films risquant d'être assez nombreuses (mais indispensables).

Avant d'entrer dans le détail de cette critique, je me dois de vous expliquer ce que je pense de la licence. Basiquement : je m'en fous. Sérieusement j'ai vu les 3 premiers et ces derniers ont suffit à me convaincre que je n'étais pas fait pour apprécier cette licence. Résultat je n'ai pas vu le 4, 5 et 6 (à la limite des bribes éparses du 5). C'est surtout l'atmosphère assez beauf et m'as tu vu qui m'a toujours dérangé avec cette ambiance "racaillons wesh wesh je bois du coca zéro et la vie est un clip de rap". Si j'ai tenu devant les trois premiers c'est pour l'intrigue du 1 qui était assez efficace (normal ça piquait les grandes lignes du génial Point Break) et les poursuites en autos des deux autres qui demeuraient bien foutues. Alors pourquoi suis je allez voir ce Fast and Furious 7 ? D'une part pour le casting qui envoyait du rêve et dans l'espoir de me remettre de ma déception avec Expendables 3. Ensuite les promesses du film qui semblait davantage se diriger vers l'actionner bourrin et décérébré que vers le prétendu film générationnel à la con, hymne à une culture beauf que le premier prétendait être. Et je n'ai pas été déçu. Fast and Furious 7 est bien un film bourrin et décérébré mais qui est foutrement bon dans ce qu'il entreprend.

Et là je me rend compte que cette critique va être assez simple à rédiger. Vous avez lu ou relu ma critique de Expendables 3 comme je vous l'ai vivement conseillé en début d'article ? Si vous ne l'avez pas fait et bien tant pis pour vos mouilles. Parce que oui voici comment on peut qualifier ce Fast and Furious 7 : prenez tout les éléments que je considère comme étant ratés dans Expendables 3 et réussissez les. Expendables 3 a raté l'icônisation de ses personnages et en particulier son méchant ? Fast 7 l'a réussi. Expendables 3 avait une technique affligeante empêchant de prendre son pied dans les scènes d'actions, en plus d'être relativement banal dans ces dernières ? Fast 7 propose une action démesurée, chorégraphiée à merveille et ayant une réalisation qui tient la route et permet au spectacle d'être total. Expendables 3 était incapable d'exploiter correctement son casting imposant ? Fast 7 donne à chaque acteur présent son petit moment pour briller et en plus le film se paie le luxe d'être convainquant dans ses relations entre les personnages... En clair, Fast and Furious 7 représente le Expendables 3 que j'aurais aimé avoir devant les yeux... voir mieux encore : il représente tout ce que considère qu'un bon actionner doit être.

Faire des constats, c'est pas vraiment le genre de la maison m'voyez...

Mais une critique ne doit pas être qu'une vaine comparaison dont la valeur serait d'avance tronquée par la dépréciation que je peux avoir vis à vis de l'élément comparatif. En clair, on sait que Expendables 3 c'est du purin et il n'y a pas de gloire à surpasser quelque chose de mauvais. Alors concentrons nous davantage sur le pourquoi Fast and Furious 7 est réussi.

Déjà dans un film d'action, la première chose qu'il faut regarder c'est.... l'action bien sur. Et si à cette question vous vouliez répondre "le scénario", vous devez avoir une case en moins. Mais tant que l'on aborde ce point : évidemment un bon scénario ça fait toujours plaisir et on peut faire de bons actionners avec de bons scénarios. Sauf que ce n'est pas le point absolument prioritaire. D'ailleurs l'importance que l'on accorde au scénario est assez paradoxale avec le fait que le cinéma est avant tout un art visuel, stimulant des émotions grâce à ce qu'il représente et pas toujours grâce à ce qu'il dit. Et dans le cadre de ce Fast 7 ? Et bien le scénario, aussi minimaliste soit-il remplit plutôt bien son office. Certes c'est con et ça ne vole pas haut mais ça suffit à légitimer le fait que l'on embarque dans un tour du monde avec cette bande de démolisseurs de l'extrême. Et finalement c'est tout ce qu'on lui demande.

Maintenant sortons de cette digression pour nous concentrer sur l'action et autant vous le dire : Fast 7 est excellent sur ce point. Certes parfois on peut regretter une caméra qui a tendance à ne pas savoir se poser, mais jamais la lisibilité de l'action n'en pâti réellement. On notera aussi un très bon travail effectué sur les cascades et des chorégraphies impressionnantes (qu'il en soit pour les poursuites en autos ou les combats). Mais ce qui est surtout bien vu c'est la construction des moments de bravoure dont on peut considérer qu'il y en a 3 vraiment majeurs. Chacune de ces scènes est construites comme un petit film se renouvelant grâce à des rebondissements aussi What the Fuckesque que finalement bien pensés. La démesure de l'action est le plus souvent absurde et débile mais à chaque fois il y a un petit truc pour légitimer le fait que l'on va vous montrer quelque chose d'encore plus spectaculaire. Et vu le ton du film, il est aisé pour le spectateur d'accepter cette démesure de tout les instants.

Car là est un point que j'ai apprécié devant ce Fast 7 : jamais le film n'a le besoin de se réfugier derrière l'autel du second degré pour que nous puissions accepter sa démesure. En fait il est dans le premier degré mais à côté de ça on nous montre dès le début, par le biais d'une introduction géniale, que ça va être du grand n'importe quoi au niveau de l'action. En résulte un décalage qui passe étonnamment bien. Et ça c'est quelque chose que peu de films d'actions du moment parviennent à faire... pas même les "bons" Expendables (à savoir le 1 et le 2). Et cette décomplexions dans la démesure alliée à un vraie prise de conscience des enjeux de l'histoire (aussi conne soit elle) c'est un esprit tout droit sorti des années 80/90 (vous avez dû remarquer que j'aime me référer à cette période). Stallone a bien essayé de retranscrire ceci dans le premier Expendables, mais bizarrement la sauce ne prenait pas aussi bien que dans ce Fast 7... Il a réessayé avec Expendables 3 pour le résultat qu'on lui connait.

Et là j'en viens à un autre point que le film de James Wan réussit à faire là où celui de Hughes se plante misérablement : l'icônisation des personnages et leur exploitation à l'image. Je pense même que ce Fast and Furious 7 est l'un des actionners contemporains les plus réussis à ce niveau là. Et de là peut sans doute provenir le premier bémol pour ceux qui suivent la saga depuis ses débuts : ce que les protagonistes gagnent en stature d'icônes, ils le perdent en humanité. Ce point est renforcé par la démesure totale des scènes d'actions. Souvenez vous le premier opus où Dom Torreto, après avoir subi un tonneau dans sa voiture semble physiquement amoché... Bon et bien dans ce volet il peut rentrer en frontal dans une autre auto sans même s'être foulé le petit doigt... Et là je peux concevoir les grincements de dents chez certains. Mais bon les faits sont là : le film sait mettre en valeur son casting pourtant imposant. Chaque élément a le droit à son petit moment à lui où la réalisation ou l'histoire vont lui permettre de s'imposer et ce même pour des rôles ultra secondaires tels que ceux tenus par Tony Jaa ou Ronda Rousey. Mais ceux profitant le plus de cette qualité de traitement demeurent The Rock dont même si on le voit assez peu en impose dans chacune de ses scènes, Vin Diesel, Michelle Rodriguez qui pour une fois est autorisée à faire autre chose que froncer les sourcils et pour le coup s'avère assez bien exploitée, mais surtout Jason Sthatam. Se définissant comme étant la Némésis du groupe, il illustre à merveille l'idée qu'un méchant n'est pas menaçant et badass parce qu'on le dit mais surtout parce qu'on le montre. Et il est tellement surpuissant, qu'il prend une dimension quasi-surnaturelle au point où l'on ne s'étonnera même pas de le voir arriver dans une scène de façon impromptue. C'est un méchant juste jouissif qui renvoie celui interprété par Mel Gibson dans Expendables 3 dans son coin en lui glissant une petite tape humiliante derrière la tête.

Maintenant je pourrais conclure ma critique ici mais il y a un éléphant au milieu de l'allée dont je me sens obligé de vous parler. Vous l'aurez deviné, il s'agit de la disparition prématurée de l'acteur Paul Walker (décédé dans un accident de voiture) et de comment cela peut s'en ressentir dans le film. Déjà sur un plan technique il n'y a aucun problème majeur finalement. L'acteur a pu tourner la majeure partie de ses scènes et lorsqu'il a dû être doublé, les trucages sont quasiment imperceptibles. Pas de disparition soudaine du script sans que l'on comprenne pourquoi, ni un temps de présence limitée de manière inexplicable. Non son personnage est exploité comme il se devait de l'être jusqu'à la fin et rien que pour ça j'ai envie de dire respect. Mais l'autre point qui a attiré le débat c'est surtout la fin, en forme d'hommage adressé à l'acteur. Les plus cyniques auront reprochés, à raison, une forme un peu maladroite collant mal à l'esprit du film ainsi qu'un manque de subtilité. Avant d'aller plus loin sachez que je ne suis pas de ceux qui ont été affectés par la disparition de Paul Walker. Bien sur c'est un fait tragique et de ce que j'en ai vu, il avait le potentiel pour jouer de bons rôles. Le soucis c'est qu'en dehors de la franchise Fast and Furious dont je ne suis pas un fan, il n'a pas fait grand chose de "remarquable" au niveau cinématographique. Encore une fois cela ne retire rien à l'aspect tragique d'une mort prématurée pour un homme si jeune et ayant une famille. Mais autant vous dire que je ne me sentais pas spécialement concerné par l'hommage qui lui est adressé à la fin... mais j'ai quand même apprécié que ce film prenne le temps de faire ça même si c'était maladroit et peu subtil. Car en effet je ne pense pas que cet hommage est juste putassier et je considère qu'il s'agit d'une maladresse bienveillante vis à vis de laquelle le cynisme ne me parait pas être une réponse appropriée. Il est normal que des gens ayant travaillés avec une personne tant d'années durant, comme ce fut le cas de Vin Diesel avec Walker, décident de lui rendre un petit hommage... D'autant plus quand il s'agit du dernier film d'une franchise vis à vis de laquelle son nom est indissociable. Et là je pense aussi aux fans de Fast and Furious. Ces personnes ont grandi avec Paul Walker et évidemment son décès les a affectées. Et là je trouve ça bien que cet ultime volet pour l'acteur, prenne ce temps avec les fans de lui faire un adieu digne de ce nom. Paul Walker n'était pas une personne importante à mes yeux en revanche, pendant ces deux minutes j'ai pu comprendre qu'il était important aux yeux d'autres personnes. Et c'est là le but d'un hommage : saluer une personne qui nous était chère et transmettre aux autres à quel point cette personne l'était à nos yeux. Et ça la fin le réussit plutôt bien par le biais d'une image finale assez belle d'ailleurs. Donc oui, c'est pas subtil, ça nous sort du film, mais en l'état je ne juge pas ça comme étant critiquable.

Donc en conclusion ce Fast and Furious 7 représente l'apothéose du film d'action. Celui qui aime le cinéma bourrin et décérébré mais fait avec intelligence et soucis de la qualité ainsi que de la pertinence; ne peut qu'apprécier ce volet de la franchise. Je ne parlerai pas de chef d'oeuvre et je peux toujours regretter l'esprit assez beauf qui demeure présent, mais même ceci n'a pas suffit à diminuer mon plaisir. Voici un bon gros film d'action con et débile mais qui a au moins le mérite d'avoir conscience de qu'il est et ne prétend pas être autre chose. Et quitte à être débile et con, autant y aller à fond et au moins permettre aux spectateurs de s'amuser sans non plus les faire culpabiliser. Je le recommande chaudement.